L’Unsa et la CFDT vers un pôle réformiste
En congrès à Pau cette semaine, l’Unsa cherche à jouer son rôle dans un nouveau paysage syndical. Elle choisit d’assumer son « réformisme ». Alain Olive est réélu secrétaire général.
À Pau, dans son intervention de clôture du débat sur l’activité de l’Unsa, Alain Olive s’en est réjoui : « La crise a fait irruption dans le congrès », a-t-il affirmé. C’est en fait par le soupirail qu’elle a fait son intrusion. Durant deux jours, les conditions de travail, l’emploi, les salaires, les « réformes » gouvernementales, questions très présentes dans le rapport du secrétaire général, n’ont fait leur apparition que dans de très rares interventions.
Aucun débat n’a vraiment eu lieu sur les objectifs revendicatifs du syndicat. Il y avait pourtant du grain à moudre de ce côté-là, par exemple quand, à propos des retraites, Alain Olive estime, sans provoquer de réactions, que le basculement « d’un système par années de cotisation à un système par points du calcul de la retraite de base préserverait le principe de la retraite par répartition ». Alain Olive a appelé à ne pas avoir « le réformisme honteux ».
Le congrès a donné lieu à une suite d’interventions portant essentiellement sur « le développement de l’Unsa » et l’avenir du syndicalisme, confronté à la loi sur les nouveaux critères de la représentativité. L’Unsa avait critiqué certains aspects de la loi du 20 août 2008, mais lui avait reconnu une qualité essentielle : elle fait de l’élection, et non de l’arrêté de 1966 comme auparavant, « le cœur de la légitimité syndicale ».
Elle se sent donc fondée aujourd’hui à chercher à « jouer dans la cour des grands » comme le signale un représentant des transports. Mais, si l’organisation syndicale fonde l’avenir sur son propre développement, Alain Olive veut mettre ce développement au service du « rapprochement » avec d’autres organisations syndicales. Il affirme « ne rien regretter » de la tentative avec la CGC. « L’échec – pour l’instant – de cette démarche ne signe pas l’échec de toute tentative de rassemblement d’un pôle réformiste. »
L’Unsa ne renonce donc pas. Il ne s’agit cependant plus de construire un « troisième pôle » regroupant l’Unsa, la CFTC, la CGC et des éléments de FO face à la CGT et la CFDT, mais de réunir l’ensemble du mouvement syndical réformiste. Alain Olive reconnaît que « nous en avons terminé avec le Yalta syndical d’après guerre », et qu’« aucune organisation importante ne se réclame aujourd’hui du syndicalisme révolutionnaire ».
Mais, selon lui, « il reste dans le mouvement syndical des conceptions et des pratiques marquées par cette histoire » : « Il y a toujours une ligne de partage qui sépare les organisations à dominante protestataire et les organisations à dominante réformiste. » Interrogé par l’Humanité, le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque, présent pour la première fois à un congrès de l’Unsa, affirme qu’il partage totalement cette vision d’Alain Olive : « En ce vingtième anniversaire de la chute du mur, nous devons rappeler que nous, nous ne nous sommes jamais trompés sur la démocratie. »
Selon lui, Alain Olive « tire la leçon de l’échec du rapprochement avec la CGC. Nous avions fait nous aussi des tentatives avec l’Unsa, rappelle-t-il. Avec d’autres méthodes, nous allons dépasser nos divergences ». Michel Doneddu, représentant de la CGT au congrès, ne cachait pas son étonnement : « À part sur la question des retraites, je n’ai perçu que des convergences avec ce que nous pensons dans le rapport. Alors pourquoi cette ligne de partage ? » Le congrès, qui a vu le rapport du secrétaire général approuvé par 98,18 % des mandats et Alain Olive reconduit dans ses fonctions à la quasi-unanimité, a donc été marqué par un rapprochement entre l’Unsa et la CFDT.
Alain Olive a néanmoins prévenu la CFDT qu’elle ne devait pas « chercher à être la première organisation sur un champ de décombres », mais être « un pôle de rassemblement à part égale avec les autres forces ».
Olivier Mayer
